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Mon école

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A la veille du congé de Toussaint (je persiste à appeler ainsi le congé amené par la fête de la Toussaint), j’ai rencontré une institutrice d’une bonne quarantaine d’années qui n’en pouvait plus, tellement, disait-elle, le métier est pénible. Sommes-nous dans une situation où des gens, à la fleur de l’âge, sont à ce point épuisés après deux mois de travail ?

Tout le monde sait que s’occuper d’enfants, non pas dans une garderie où on joue à colin-maillard, mais dans une école où on apprend et où on éduque, est chose exigeante.

Je poursuivis ma conversation avec cette enseignante et lui demandai dans quelles conditions elle travaillait. J’appris qu’elle s’occupait d’une classe de troisième d’une vingtaine d’élèves. Le milieu n’était pas particulièrement difficile.

Je ne pus que l’encourager et lui dire que le petit congé allait la requinquer.

Puis, une fois seul, je repensai à mon école primaire.

Je n’avais pas encore 5 ans et demi quand, après les vacances de Pâques, une élève de 5e année, accompagnée de son petit frère du même âge que moi, vint me chercher pour me conduire à l’école, rue du Thier. Il n’y avait pas d’école gardienne, et l’instituteur prenait les nouveaux élèves pendant le 3ème trimestre pour les familiariser à l’école. Point de parents sur le seuil de l’école, point de bus pour le ramassage. Tous venaient à pied, avec la mallette de cuir au dos. Point de pique-nique non plus, car à 11 h 30, le maître clôturait la matinée, renvoyait les enfants à la maison pendant que lui, rejoignait, à pied, son domicile pour y dîner. L’après-midi, on recommençait à 13 h 30 pour terminer à 15 h 30. Le jeudi était le seul jour de congé.

Notre classe était un grand local (ou plutôt que nous trouvions très grand et qui existe encore), avec un grand tableau sur lequel le maître avait réparti le travail du matin pour les six classes. Oui, vous avez bien lu, l’instituteur (plus tard, l’institutrice) devait enseigner aux six niveaux rassemblés dans ce même local. Chaque niveau (ou année) disposait d’une rangée de bancs. Une année, il pouvait y avoir 20 élèves dans la classe, et la suivante, on pouvait se retrouver à 25 compte tenu des rentrées dans la classe de première. Un poêle situé en plein milieu du local avec une « buse » qui sortait par une fenêtre chauffait tant bien que mal ce petit monde.

Je ne me rappelle plus très bien comment nous faisions pour nous concentrer sur un travail pendant que le maître expliquait une matière aux autres classes. Je sais que nous étions autonomes, bien que des collaborations fussent possibles, par exemple, entre les élèves de 5e et de 6e. L’essentiel de notre travail consistait à faire du calcul le matin, et du français l’après-midi. Occasionnellement, le maître annonçait une leçon d’histoire où on parlait des guerres, de Napoléon… des différents rois des Belges. On étudiait par cœur, puis on récitait et l’affaire était classée. Il en allait de même en géographie où on étudiait la capitale des différents pays qui nous étaient proches, les différents cours d’eau de la Belgique avec leurs affluents… et puis c’était tout. Evidemment, point d’éducation affective et sexuelle. Nous n’avions qu’à observer le comportement de nos animaux de ferme ! Etait-ce le mardi ou le mercredi après-midi, l’épouse de l’instituteur venait apprendre la couture aux filles tandis que les garçons allaient au jardin avec l’instituteur. Pourtant, quand nous sortions de l’école primaire, les écoles dites réputées nous accueillaient à bras ouverts. L’essentiel n’était-il pas le français et le calcul ?

Dois-je signaler que je ne me souviens pas que l’instituteur ou l’institutrice ait été malade fort souvent, car nous aurions eu congé pendant leur courte absence. Il y eut bien, une fois ou l’autre, un enseignant intérimaire, mais alors, c’est que les choses étaient très sérieuses et la durée de la maladie très longue.

Je n’ai pas souvenance d’avoir vu mes parents, ne fût-ce qu’une seule fois, à l’école. La confiance entre les parents et l’enseignant était totale.

J’en reviens à notre institutrice. Sommes-nous plus fragiles ? Voyons-nous les choses autrement ? Le monde qui nous entoure prête-t-il à moins d’équilibre ?....

Déjà, bonnes fêtes de fin d’année.

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